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    A une fleur

    Que me veux-tu, chère fleurette,

    Aimable et charmant souvenir ?

    Demi-morte et demi-coquette,

    Jusqu'à moi qui te fait venir ?

     

    Sous ce cachet enveloppée,

    Tu viens de faire un long chemin.

    Qu'as-tu vu ? que t'a dit la main

    Qui sur le buisson t'a coupée ?

     

    N'es-tu qu'une herbe desséchée

    Qui vient achever de mourir ?

    Ou ton sein, prêt à refleurir,

    Renferme-t-il une pensée ?

     

    Ta fleur, hélas ! a la blancheur

    De la désolante innocence ;

    Mais de la craintive espérance

    Ta feuille porte la couleur.

     

    As-tu pour moi quelque message ?

    Tu peux parler, je suis discret.

    Ta verdure est-elle un secret ?

    Ton parfum est-il un langage ?

     

    S'il en est ainsi, parle bas,

    Mystérieuse messagère ;

    S'il n'en est rien, ne réponds pas ;

    Dors sur mon coeur, fraîche et légère.

     

    Je connais trop bien cette main,

    Pleine de grâce et de caprice,

    Qui d'un brin de fil souple et fin

    A noué ton pâle calice.

     

    Cette main-là, petite fleur,

    Ni Phidias ni Praxitèle

    N'en auraient pu trouver la soeur

    Qu'en prenant Vénus pour modèle.

     

    Elle est blanche, elle est douce et belle,

    Franche, dit-on, et plus encor ;

    A qui saurait s'emparer d'elle

    Elle peut ouvrir un trésor.

     

    Mais elle est sage, elle est sévère ;

    Quelque mal pourrait m'arriver.

    Fleurette, craignons sa colère.

    Ne dis rien, laisse-moi rêver.

    Alfred de Musset

     


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    L'iris

    Près des étangs où la libéllule voltige,

    Où, dans les soirs d'été, vient se baigner l'oiseau,

    On aperçoit l'Iris, qui tremble sur sa tige

    Et semble un papillon posé sur un roseau.

     

    Du bleu foncé des mers elle reçut l'empreinte,

    Prise à l'heure où la nuit noircit l'azur des cieux.

    Seule parmi les fleurs elle offre cette teinte,

    La plus chère à l'esprit et la plus douce aux yeux.

     

    Sur la terre,  du bleu la Nature est avare,

    Et les poètes sont réduits à le rêver ;

    Si le pinceau s'applique à le rendre moins rare,

    C'est que vers l'Idéal l'Art tend à s'élever.

     

    Des Zéphirs printaniers docile messagère,

    Comme une voile au vent toujours prête à flotter,

    La forme de l'Iris, vaporeuse et légère,

    Est l'image de l'âme en train de nous quitter.

     

    Aux rayons du soleil qui brille sur la plage,

    Sa transparence émet une lueur dans l'air,

    Semblable au feu follet qui court avant l'orage,

    Et disparait soudain, absorbé dans l'éther.

    Charles Rouvin

     


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